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Catégorie : Sociologie

Contre le développement personnel de Thierry Jobard

La mode du « développement personnel » ne se dément pas. Sans cesse, nous subissons une injonction à nous libérer de nos croyances limitantes et à acquérir un « surplus d’être » pour devenir un meilleur individu. Bien sûr, on pourrait penser qu’il n’y a là que de bonnes intentions : qui refuserait une version améliorée de soi-même ? Mais derrière les discours sucrés et inoffensifs, c’est à la montée d’une idéologie politique que l’on assiste. Car la forme de bien-être promise par le développement personnel constitue trop souvent une exploitation de soi par soi…

Dans ce monde merveilleux, tout tourne autour de cet axiome : quand on veut, on peut. Et si on ne peut pas, c’est qu’on ne veut pas assez. Le collectif disparaît de l’écran pour ne laisser que des individus responsables de tout à 100 % : de leur destin, de leur emploi, et même de leur santé !

C’est à cette vaste supercherie que s’en prend ici Thierry Jobard, preuves à l’appui…

Berghain, Berlin Bacchanales de Guillaume Robin

Berlin le dimanche : quand la plupart dorment, d’autres se lèvent aux aurores pour se rendre à « la messe », donner leur corps à la danse. C’est vers le Berghain qu’ils convergent, une ancienne centrale électrique de Berlin-Est transformée en club techno. Mais, par-delà les fantasmes et les rumeurs de débauche, que nous apprend ce club sur notre rapport au corps ? Ces longues files noires ne cachent-elles pas un besoin de hors-lieux dans un monde ultra-normé ? Cette réflexion sur les pratiques corporelles en milieu techno s’appuie sur trois années de plongée ethnographique au sein d’une scène qui, à la manière des Bacchanales, semble cultiver jusqu’à l’épuisement l’extase dionysiaque et l’art des mystères.

Contre la résilience. À Fukushima et ailleurs de Thierry Ribault

Funeste chimère promue au rang de technique thérapeutique face aux désastres en cours et à venir, la résilience érige leurs victimes en cogestionnaires de la dévastation. Ses prescripteurs en appellent même à une catastrophe dont les dégâts nourrissent notre aptitude à les dépasser. C’est pourquoi, désormais, dernier obstacle à l’accommodation intégrale, l’« élément humain » encombre. Tout concourt à le transformer en une matière malléable, capable de « rebondir » à chaque embûche, de faire de sa destruction une source de reconstruction et de son malheur l’origine de son bonheur, l’assujettissant ainsi à sa condition de survivant.
À la fois idéologie de l’adaptation et technologie du consentement à la réalité existante, aussi désastreuse soit-elle, la résilience constitue l’une des nombreuses impostures solutionnistes de notre époque. Cet essai, fruit d’un travail théorique et d’une enquête approfondie menés durant les dix années qui ont suivi l’accident nucléaire de Fukushima, entend prendre part à sa critique.
La résilience est despotique car elle contribue à la falsification du monde en se nourrissant d’une ignorance organisée. Elle prétend faire de la perte une voie vers de nouvelles formes de vie insufflées par la raison catastrophique. Elle relève d’un mode de gouvernement par la peur de la peur, exhortant à faire du malheur un mérite. Autant d’impasses et de dangers appelant à être, partout et toujours, intraitablement contre elle.

L’inde ancienne au chevet de nos politiques de Jean-Joseph Boillot

L’Inde ancienne au chevet de nos politiques – L’art de la gouvernance selon l’Arthashâstra de KautyliEcrit il y a plus de vingt-cinq siècles, l’Arthashâstra propose une véritable doctrine de l’Etat, moderne, bienveillant et efficace. Kautilya, surnommé le Machiavel indien, porteur d’un conservatisme éclairé, y défend autant le-bien-être du peuple que l’autorité de son Roi. De cet immense traité, Jean-Joseph Boillot a extrait, traduit et adapté les grands principes de la bonne gouvernance. Parfaitement intemporelles, les questions qu’il aborde sont parfois même d’une étonnante actualité. Comment choisir ses ministres et mettre à l’épreuve leur moralité ? Comment assurer la sécurité des biens et des personnes ? Quel soin porter aux finances publiques et en prévenir les détournements ? Quelle place accorder à la justice ? Qu’est-ce que la souveraineté de l’Etat ? Alors que les grandes démocraties occidentales souffrent d’une profonde crise de gouvernance, que leurs dirigeants et leurs programmes ne sont plus capables d’enrayer la montée des populismes, le citoyen trouvera peut-être un peu de réconfort et le politique un peu d’inspiration à la lecture de l’un des plus grands traités de l’Inde ancienne.

Du silence de David Le Breton

Les usages sociaux et culturels accordent à la parole et au silence une alternance qui varie d’un lieu à l’autre et d’une personne à l’autre. Cependant, face au silence les uns éprouvent un sentiment de recueillement, de bonheur tranquille, tandis que d’autres s’en effraient et cherchent dans le bruit ou la parole une manière de se défendre de la peur.


« Soudain paraît un anthropologue singulier, David Le Breton, jusqu’alors interrogateur du corps socialisé, de l’expressivité des visages, de la douleur et des maux de la chair , qui parle d’abondance du silence. Et qui s’étonne lui-même d’avoir conçu tant de phrases sur  » une étoffe de silence ». » Georges Balandier, Le Monde.

La supercherie du télétravail de Christian Gauffer

Cet ouvrage est en décalage avec le discours ambiant. Une forme de saillie dans l’air du temps provoquant un inconfort pour le lecteur. Il pose de nombreuses questions, nous poussant à réfléchir, que l’on soit d’accord ou pas avec le point de vue engagé qui y est exposé. Supercherie, tromperie, escroquerie, chacun pourra se faire son opinion. Le regard d’un psychanalyste sur ce sujet d’actualité peut être surprenant, mais son approche est décapée par l’écoute de la souffrance des patients. Dans un effet de caisse de résonance et de dévoilement, il distingue les enjeux formels du télétravail des enjeux véritables, en redonnant au travail sa pleine dimension politique.

La société de transparence de Byung-Chul Han

Nous sommes entrés dans l’ère de la transparence, qui semble bien structurer désormais tous les aspects de notre vie – du collectif à l’individuel, du politique à l’intime. Naît alors un carcan dans lequel les choses sont lissées, intégrées sans résistance dans les flux de la communication et dépouillées de leurs singularités. Comme sur un marché, tout est exposé, réduit à son
prix, privé de récit. Les corps eux-mêmes sont dénués de sens ; les visages perdent leur scénographie ; le temps est atomisé. Nous voilà dans un « enfer de l’identique », où les informations se succèdent sans combler le vide permanent dont nous sommes prisonniers, et où nous n’avons d’autre issue que de liker pour approuver.

Ne tolérant aucune faille, la société de transparence nous confronte à un choix : être visible ou être suspect. L’homme peut-il encore s’échapper de cette société de contrôle total ?

Habiter contre la métropole de Conseil nocturne

Dans la Métropole, la sensation de vivre dans un camp de concentration planétaire est à son comble. Face à un bouleversement global et dévastateur des modes de vie, la question qui fait écho en nous est la suivante?: « Où fuir?? » Occuper pleinement, arracher des territoires aux mains de la gouvernance mondiale capitaliste, créer des communautés sont les actes révolutionnaires de ceux et celles qui ont cessé d’espérer, de croire aux «  »miracles » » de l’urbanisme et autres sciences du gouvernement. La création constante de mondes n’est pas un problème sinon un besoin vital dont on décide de se charger ou que l’on délègue à l’oppresseur.

Sorcières, la puissance invaincue des femmes de Mona Chollet

Tremblez, les sorcières reviennent ! disait un slogan féministe des années 1970. Image repoussoir, représentation misogyne héritée des procès et des bûchers des grandes chasses de la Renaissance, la sorcière peut pourtant, affirme Mona Chollet, servir pour les femmes d’aujourd’hui de figure d’une puissance positive, affranchie de toutes les dominations.

Qu’elles vendent des grimoires sur Etsy, postent des photos de leur autel orné de cristaux sur Instagram ou se rassemblent pour jeter des sorts à Donald Trump, les sorcières sont partout. Davantage encore que leurs aînées des années 1970, les féministes actuelles semblent hantées par cette figure. La sorcière est à la fois la victime absolue, celle pour qui on réclame justice, et la rebelle obstinée, insaisissable. Mais qui étaient au juste celles qui, dans l’Europe de la Renaissance, ont été accusées de sorcellerie ? Quels types de femme ces siècles de terreur ont-ils censurés, éliminés, réprimés ? 
Ce livre en explore trois et examine ce qu’il en reste aujourd’hui, dans nos préjugés et nos représentations : la femme indépendante –; puisque les veuves et les célibataires furent particulièrement visées ; la femme sans enfant –; puisque l’époque des chasses a marqué la fin de la tolérance pour celles qui prétendaient contrôler leur fécondité ; et la femme âgée – devenue, et restée depuis, un objet d’horreur. 
Enfin, il sera aussi question de la vision du monde que la traque des sorcières a servi à promouvoir, du rapport guerrier qui s’est développé alors tant à l’égard des femmes que de la nature : une double malédiction qui reste à lever. 

Argent de Christophe Hanna

« Dans le compartiment du train, seconde classe, qui me ramène de Genève, où je viens de faire une performance, vers Lyon ; il y a une jeune femme qui me regarde prendre des notes. Nous sommes au mois de juin 2015, elle porte un jean fendu au genou, des tongs bleues, un sac à dos, je lui donne 30 ans. Elle me sourit. Je lui dis que j’écris sur l’argent des gens que je rencontre en écrivant. Elle trouve ça amusant, elle rit en répondant à mes questions et devient la quatre-vingtième personne avec qui j’ai une discussion d’argent délibérément menée pour ce livre. Noémie1680 est assistante sociale. Elle a l’impression d’être ni riche ni pauvre, d’être dans la médiane comme ses amis. Cette semaine, elle a bu des verres avec eux, acheté des tee-shirts chez H&M (elle en porte un) pour environ 150 euros. Son métier l’aide à mieux connaître le fonctionnement des impôts, des crédits. Cette année, elle a même pu mettre de l’argent de côté pour ses vacances, plus de 200 euros par mois sur un compte spécial. »