Zone Temporaire Noétique

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Catégorie : Anthropologie

Le rêve du chien sauvage de Deborah Bird Rose

Comment résister à la peur et à l’impuissance que provoquent aujourd’hui les extinctions de masse dans la grande  » famille des vivants  » ?

Deborah Bird Rose nous propose ici de penser, sentir et imaginer à partir d’un terrain concret et situé : les manières de vivre et de mourir avec les chiens sauvages d’Australie, les dingos, cibles d’une féroce tentative d’éradication.
En apprenant des pratiques aborigènes, de leurs manières de se connecter aux autres vivants, elle active une puissance que la Raison occidentale a dévolue aux seuls humains : l’amour. Que devient cette capacité de répondre à l’autre, cette responsabilité, quand elle s’adresse à tous les terrestres ? En s’attachant à des bribes d’histoires logées dans nos grands récits moraux et philosophiques, elle fait sentir que le non-humain continue d’insister silencieusement et que cet appel, perçu par Lévinas dans les yeux d’un chien rencontré dans un camp de prisonniers en Allemagne nazie, n’en a pas fini de nous saisir et de nous transformer.
Il s’agit de faire sentir et aimer la fragilité des mondes qui se font et se défont, au sein desquels des vivants hurlent contre l’inexorable faillite, tressent des chants inoubliables. Les faits parlent d’eux-mêmes, disent parfois les scientifiques de laboratoire. Ici, ils nous parlent.

À l’est des rêves de Nastassja Martin

Après avoir travaillé en Alaska avec le peuple Gwich’in, Nastassja Martin a franchi le détroit de Béring pour entamer une recherche comparative au Kamtchatka. Pendant l’époque soviétique, les Even, peuple nomade d’éleveurs de rennes, ont été sédentarisés dans des fermes collectives. Après la chute du régime, beaucoup ont continué d’être les bergers des rennes qui ne leur appartenaient plus, les troupeaux étant aux mains d’entreprises privées. Depuis l’ouverture de la région en 1991, les anciens kolkhozes du Kamtchatka se transforment en plateformes touristiques.
En 1989, juste avant la chute de l’Union soviétique, une famille even aurait décidé de repartir en forêt, recréer un mode de vie autonome fondé sur la chasse, la pêche et la cueillette. Était-ce une légende ? Comment un petit collectif violenté, spolié, asservi par les colons avant d’être oublié de la grande histoire s’est-il saisi de la crise systémique pour regagner son autonomie ? Comment a-t-il fait pour renouer les fils ténus du dialogue quotidien qui le liait aux animaux et éléments, sans le secours des chamanes éliminés par le processus colonial ? Quelles manières de vivre les Even d’Icha ont-ils réinventées, pour continuer d’exister dans un monde rapidement transformé sous les coups de boutoir de l’extractivisme et du changement climatique ?
Dans ce livre, où les rêves performatifs et les histoires mythiques répondent aux politiques d’assimilation comme au dérèglement des écosystèmes, l’autrice fait dialoguer histoire coloniale et cosmologies autochtones en restituant leurs puissances aux voix multiples qui confèrent au monde sa vitalité.

Les enfants gâtés de Fanny Parise

COMMENT L’INJONCTION « CONSOMMER MIEUX ET MOINS » DEVIENT : « CONSOMMER MIEUX ET PLUS »

Qui est ce groupe d’individus sans conscience de classe qui critique la société de consommation tout en permettant au système de perdurer ? Les « enfants gâtés », comme les nomme l’anthropologue Fanny Parise, jouent-ils le rôle qu’ils prétendent jouer – celui de réformer un système destructeur – ou participent-ils malgré eux à la reproduction du système et de ses inégalités socioculturelles ?
L’enjeu de cet ouvrage est de faire le point sur le mythe de la contre-culture postcapitaliste : pour commencer, qu’a-t-elle de « post » capitaliste, précisément, cette contre-culture ? Et comment ce mythe amène-t-il insidieusement à passer de l’injonction « consommer mieux et moins » à celle de « consommer mieux et plus » ?
Vous allez adorer détester les enfants gâtés : ils sont toujours l’autre, mais chacun de nous peut se reconnaître par certains aspects en eux. Faites-vous partie de ces influenceurs qui s’ignorent dont l’objectif la plupart du temps inconscient est de continuer à consommer comme avant sans passer pour un suppôt écocide du grand capital ?

Fanny Parise est anthropologue, spécialiste des mondes contemporains et de l’évolution des modes de vie. Elle a consacré la dernière décennie à étudier les phénomènes de déconsommation. Elle enseigne à l’université en France et en Suisse, et est la créatrice du podcast Madame L’Anthropologue, dans lequel elle invite ses auditeurs à découvrir l’actualité sous le prisme de l’anthropologie.

Proliférations d’Anna L. Tsing

La prolifération comme condition écologique et anthropologique contemporaine – une clef pour comprendre l’état du monde

Maladies émergentes, extinctions, plantes invasives : dans les « ruines du capitalisme », une foule de vivants se met à habiter les écosystèmes de façon troublante.

Là où les êtres humains détruisent les équilibres, les vivants se mettent à proliférer. Nous avons envahi le monde ; en retour le vivant prolifère.

L’anthropologue explore ici, en trois courts textes, les différentes facettes des multiples déséquilibres biologiques en cours.

Sur la piste animale de Basptiste Morizot

Depuis les forêts du Yellowstone aux crêtes du Kirghizstan, des steppes du Haut-Var à la terrasse de son appartement, Baptiste Morizot nous invite à partir sur les traces d’êtres hors du commun, souvent mythifiés : les grands prédateurs – ours, loups, panthères des neiges…
À travers différents récits de pistage, l’auteur nous propose ainsi de nous « enforester », selon l’expression des coureurs de bois du Grand Nord canadien : porter son attention sur le vivant simultanément autour de nous et en nous, et apprendre à cohabiter avec lui.
Page après page, le pistage repeuple la nature, et notre monde intérieur.

Vous avez un chien d’Yona Friedman

Vous avez un chien se présente sous la forme d’une bande dessinée qui met en scène un/e chien/ne et son/sa maître/sse. C’est un manuel d’éducation pour tous ceux qui vivent avec des animaux domestiques ou d’autres êtres vivants. Ecrit par Balkis Berger-Dobermann, qui partage la vie des Friedman depuis plus de douze ans, Vous avez un chien aurait pu s’intituler « Comment dresser ses maîtres», mais l’auteur a préféré s’en tenir à un titre plus « général » et moins « anthropomorphe ».
Vous avez un chien est aussi un livre pour ceux qui ont des chats, des canaris, des poissons rouges. Il énonce selon des principes simples «comment vivre avec les autres, sans être maître, ni esclave» pour reprendre le titre d’un autre ouvrage de Friedman.

Le cadeau de Noël, histoire d’une invention de Martyne Perrot

Quelque part entre le rêve et le négoc

Sous le sapin, l’abondance. Chaque hiver, les cadeaux de Noël foisonnent, hâtivement déballés, puis, parfois, revendus aussi vite. Objet désormais devenu ordinaire, voire inconditionnel, son histoire remonte à la tradition des strenæ, célébrée dans la Rome antique. Plus tard, au XIXe siècle, on pare le cadeau de Noël de magie (ne dit-on pas qu’ils tombent du ciel ?) au moment où les grands magasins prennent leur essor et le commercialisent.

Objet fantasmagorique, mercantile, mais aussi social, il permet à la fois d’éclairer les rapports de classe, les stéréotypes de genres, et de mettre en perspective une tradition familiale devenue sacrée : la fête de Noël. Entre blagues à tabac, poupées, tambours et autres nécessaires à broder, Martyne Perrot livre un récit minutieux de la naissance et de l’évolution de ces objets situés quelque part dans un interstice entre le rêve et le négoce.

Croire aux fauves de Nastassja Martin

«Ce jour-là, le 25 août 2015, l’événement n’est pas : un ours attaque une anthropologue française quelque part dans les montagnes du
Kamtchatka. L’événement est : un ours et une femme se rencontrent et les frontières entre les mondes implosent. Non seulement les limites physiques entre un humain et une bête qui, en se confrontant, ouvrent des failles sur leurs corps et dans leurs têtes. C’est aussi le temps du mythe qui rejoint la réalité ; le jadis qui rejoint l’actuel ; le rêve qui rejoint l’incarné.»

Les âmes sauvages de Nastassja Martin

Face à l’Occident, la résistance d’un peuple d’Alaska

C’est l’hiver et la température avoisine les moins quarante degrés. Les yeux levés vers les aurores boréales qui animent le ciel arctique, nous écoutons. Le chasseur commence à siffler dans leur direction. C’est un son continu, aigu mais contenu, qui résonne dans le silence de la nuit polaire. Qui appelles-tu ? Elles, les aurores, et ceux qui transitent avec elles, les esprits des disparus, des hommes, des animaux, des plantes, qui courent sur un ciel glacial dans les explosions de couleurs.
Qui sont ces hommes qui se nomment eux-mêmes les Gwich’in et peuplent les forêts subarctiques ? Sont-ils encore de fiers guerriers qui poursuivent les caribous jusque sur l’échine arctique de la Terre, ou ressemblent-ils plutôt à des humains dévastés par la colonisation occidentale qui titubent dans les rues verglacées des villes du Nord sous les effets de l’alcool ? Et que dire du territoire qu’ils habitent, l’Alaska contemporaine ? Cette terre demeure-t-elle fidèle aux images de nature sublime et préservée qui peuplent nos esprits d’Occidentaux, ou disparaît-elle face aux réalités énergétiques, politiques et économiques qui la transforment en un champ de bataille jonché de mines à ciel ouvert et d’exploitations pétrolières ?
À l’heure du réchauffement climatique, aucun de ces clivages ne subsiste. Les mutations écologiques du Grand Nord sont telles qu’elles brouillent le sens commun et balayent toutes les tentatives de stabilisation, de normalisation et d’administration des écosystèmes arctiques et de leurs habitants. Loin de toute folklorisation indigéniste et de tout manifeste écologiste, ce livre s’attache à retranscrire les réalités des hommes qui parlent encore à l’ombre des arbres et sous le sceau de leur secret. Les âmes sauvages de l’Alaska sont celles qui se meuvent dans les plis d’un monde en révolution, et qui font de la métamorphose continuelle des choses et de l’incertitude des êtres un mode d’existence à part entière.