Zone Temporaire Noétique

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La déraison sanitaire d’Alexandra Laignel-Lavastine

Le Covid-19 et le Culte de la vie par-dessus tout

Jamais l’humanité n’avait été mieux armée médicalement face à une épidémie ; jamais elle ne se sera montrée aussi désarmée moralement. Pourquoi ? Vu l’amplitude de la crise qui s’annonce, nous ferions bien de nous interroger car nos descendants nous demanderont des comptes.

L’argument sanitaire a prévalu d’emblée. Mais serions-nous vraiment prêts à assumer le risque, hautement déraisonnable d’un point de vue civilisationnel, d’une réduction de l’homme à la « vie nue » (Walter Benjamin) ? Vers quelle tyrannie de la santé peut bien nous mener « l’État care » fantasmé par nos politiques et depuis quand ces derniers se donnent-ils pour ambition messianique de sauver les vivants ?

« Nous sommes grandioses, nous avons choisi la vie ! ». Et si le Coronavirus venait au contraire nous rappeler une vérité capitale : la vie au sens du bios est l’alpha, pas l’oméga.

À ce propos, aurait-on omis de méditer cet autre paradoxe du printemps 2020 : le jour, on souscrivait massivement au principe selon lequel la vie serait la valeur suprême. Le soir, on applaudissait en cœur un corps médical qui, par son sacrifice et son dévouement, nous démontrait d’une certaine façon l’inverse. Qu’ont-ils gagné en retour ? Rien, hormis la confirmation de leur qualité d’homme. C’est-à-dire tout. Voilà ce que notre sensibilité post-tragique ne parvient plus à comprendre.

L’impératif « Sauvons des vies ! » nous aurait-il collectivement hébétés ?